Nous avons découvert les problèmes de pertes de chaleur par l’évent de plomberie au cours du processus de certification Passivhaus, bien après la fin de la construction de la maison.
Le système d’évent de plomberie est un ensemble de tuyaux reliés à tous les appareils qui doivent évacuer de l’eau. Cela sert à apporter de l’air dans les tuyaux de drainage pour que l’évacuation se fasse correctement. On prend souvent l’exemple de la paille remplie d’eau que l’on bouche avec le doigt sur le dessus. Dans ce cas l’eau ne coule pas. Il faut apporter de l’air en relevant le doigt pour que l’évacuation se fasse. L’installation habituelle ici au Québec relie tous les appareils de plomberie à une colonne de 5 à 10cm de diamètre (“vent stack” en anglais) qui monte à la verticale du sol jusqu’à l’extérieur en passant à travers toute la maison et le toit. Ce tuyau est donc ouvert à l’air libre sur le toit. Le tuyau s’ouvre à l’extérieur, car en dehors des moments ou l’air est aspiré pour faire descendre l’eau des toilettes par exemple, de fortes odeurs d’égouts s’en dégage. Ci-dessous voici une illustration d’un plan de plomberie typique, où l’on retrouve la colonne principale et les events s’y raccordant pour chaque appareil de plomberie. Ces tuyaux d’évent ne contiennent jamais d’eau.
Nous avons construit notre maison sur ce modèle également. Le passage de la colonne principale à travers le toit a juste été très bien scellée à l’air.
Une fois le dossier de certification bien avancé, le certificateur nous annonce que le Passivhaus Institut (PHI) a décidé de prendre en compte les pertes thermiques liées à ces évents. A la base, nous pensions que les pertes de chaleur étaient négligeables car l’air ne circulait pas vraiment dans ce tuyau et qu’il passait à travers un mètre d’isolant dans le toit. Le PHI s’est rendu compte récemment après des études en conditions réelles que les pertes n’étaient finalement pas si négligeables. Ils ont décidé de prendre en compte ces pertes dans PHPP en appliquant un pont thermique négatif très sévère de la longueur de la colonne principale. Selon les cas, la perte peut aller de 2 à 4 kWh/m2/an! (presque 3 dans notre situation). Cela peut sembler dérisoire, mais dans un projet visant la certification (donc être en dessous de 15kWh/m2/an) c’est énorme. Lors de la phase de design ont a peaufiné les détails de la maison pour gagner 0,2kWh/m2/an d’un coté ou d’un autre avant de construire. Et là on t’en rajoute presque 3 d’un coup… après la construction.
Le PHI à pour le moment considéré le pire scénario, c’est a dire qu’il considère que l’intérieur du tuyau est de l’air extérieur donc à -20°C lorsqu’il fait -20°C dehors. Le calcul du pont thermique négatif (donc de la perte de chaleur) est proportionnel à la différence de chaleur entre les 2 milieux (donc ici 20°C dedans et -20°C dans le tuyau = 40°C de différence). C’est un peu comme s’il y avait un trou dans la maison. Hors, pour une maison étanche, c’est considérable dans les résultats….
Les pertes sont elles si importantes? Probablement pas mais elles sont clairement à considérer. En effet une étude récente (“Heat loss via internal drainage vent pipe”. Elemental Solution 2015) a calculé une évaluation de ces pertes et le flux d’air dans la fameuse colonne. Cette étude montre que l’air dans la colonne monte à une vitesse assez élevé (0,6m/s dans leur cas). Cet air est à la température du sol en bas de la colonne et se réchauffe progressivement au contact des paroi de la colonne (qui sont à la température intérieure de la maison, donc proche de 20°C). L’air se réchauffant monte et créé un flux d’air continu vers le haut. Dans l’étude l’air sortant dehors était à 14°C (contre 11° en bas de la colonne). Il n’y a donc pas d’air extérieur dans la colonne en dehors des courts moment ou de l’air est aspiré de l’extérieur lors que l’on tire la chasse par exemple. Ils concluent que les pertes sont plus faibles que ce que propose le PHI (environ 3 fois moins).
Voici les solutions pour diminuer ou éliminer ces pertes :
1- Isoler la colonne pour diminuer le flux de chaleur entre l’intérieur de la maison est l’intérieur de la colonne. Dans l’étude ils suggèrent que 2,5cm d’isolant suffi à diminuer encore par 2 les pertes. Cette option est a considérer si les autres ne sont pas possible et que les murs ne sont pas encore fermés ou que la colonne est accessible sur toute sa longueur.
2- Diminuer le débit d’air dans la colonne. On peut réduire le diamètre de la colonne. Ou mieux la boucher de manière intermittente. Pour cela on utilise une valve unidirectionnelle (appelée AAV pour “air admittance valve”) qui s’ouvre lorsqu’il y a un appel d’air de l’intérieur (donc quand on tire la chasse par exemple) et qui est fermée le reste du temps. C’est l’option que l’on a choisi car elle est simple, peu couteuse et efficace.
Valve Studor Maxi-Vent (50$) et sa protection en aluminium pour l’extérieur (30$) disponible sur … amazon.ca (incroyable). Elle est garantie jusqu’a -40°C. Il m’a juste fallu l’enfoncer dans le tuyau sortant du toit et coller la protection en alu.
3- Terminer la colonne à l’intérieur de la maison en mettant une valve Maxi-vent pour éviter les odeurs et le froid qui remonterai du sol. Il faut rendre cette valve accessible. (Option que j’aurai préférer réaliser tout comme mon plombier car le système est presque standard sauf la sortie et il n’y a qu’une seule valve.)
4- Ne pas mettre de colonne. Sans colonne il faut une autre façon d’apporter de l’air dans les tuyau de drainage. Cela est réalisé avec de petites AAV (appelés valves automatiques) installée proche de chaque point d’eau. Techniquement on aurai pu boucher la colonne sur le toit et modifier chaque installation de plomberie en rajoutant une valve automatique mais cela aurai couté cher. Pour une maison neuve, c’est une bonne option. L’absence de tout le système d’évent compense le cout des valves et de leur installation.
Au final en ayant rajouté la valve et en ayant des photos de notre colonne qui passe dans un mur isolé sur 2,5m de haut, le certificateur a accepté de réduire d’un peu plus de 50% les pertes par cet évent. Ceci à été un point capital pour arriver malgré tout à être sous la barre des 15kWh/m2/an.
Beaucoup de détail énergétiques des bâtiments ne sont pas calculés à chaque fois. PHPP prend alors des valeurs par défaut qui sont toujours pessimistes. Si l’on veut améliorer le profil énergétique sur le papier on peut s’atteler à calculer ces détail et montrer que le bâtiment est meilleur que ce que propose PHPP par défaut.
Dans notre cas, vu que l’on était passé au dessus de 16kWh/m2/an il a fallu aller gratter plus loin encore. Le calcul des ponts thermiques au niveau des murs a permis de récupérer les quelques kilo-watt-heure nécessaires. Je vous partagerai cette expérience dans un article ultérieur.
Répondre